Bientôt plus de boulangers dans nos petites villes et villages ruraux de Seine-et-Marne ? Notre département est non seulement le plus rural d’Ile-de-France, mais c’est aussi celui où les franchises boulangères connaissent une importante croissance. La semaine dernière, la Maison de la Boulangerie a adressé au Président de la République une lettre faisant état d’un triste état des lieux.
Faillite
Les boulangeries représentent un tiers des faillites d’entreprises dans le secteur agro-alimentaire. La faute à qui ? D’abord à notre façon de consommer qui a évolué. Aujourd’hui, nous consommons trois fois moins de pain qu’en 1950, et nos choix sont plus variés.
Flambée des prix
S’ajoutent aussi la hausse vertigineuse du coût des matières premières avec en tête le beurre, mais aussi les ingrédients comme les noix, les amandes. « Au Faubourg de l’Écluse, nous avons fait le choix de la qualité et cela devient de plus en plus difficile de proposer des produits sans augmenter le prix de vente » confie Eric Fourrey, boulanger à Moret-sur-Loing, avant de poursuivre : « Le coût des matières premières ne cesse d’augmenter. Nos très lourdes charges nous empêchent d’investir. Comment faire face quand les prix d’achat des enseignes franchisées sont 30 % inférieurs aux nôtres ? Quand ils dépendent d’une convention collective différente des artisans boulangers-pâtissiers ? Ils bradent quand nous, nous valorisons, nos produits mais surtout nos équipes. C’est le pot de terre contre le pot de fer. »
Marie Blachère
Un magasin Grand Frais doit s’installer bientôt sur le pôle économique des Renardières, à Écuelles, situé à proximité, synonyme d’installation d’une boulangerie franchisée « où l’on vend des baguettes et autres produits à prix cassés, où les employés ne sont pas qualifiés ni valorisés. Certes, cela ferait de l’emploi, mais juste pour en détruire d’autres. Une demande de permis de construire à été déposé, le projet est en cours de validation et a été annoncé par M. Jean-Philippe Fontugne. C’est incompréhensible de laisser une telle enseigne s’installer si près du centre-ville. Cela va impacter de nombreux commerçants, pas uniquement nous comme nous pouvons l’entendre. Cette situation s’est déjà produite dans plusieurs communes de France, le constat est édifiant » s’inquiète Flora Fourrey.
Car l’installation d’un supermarché sur les hauteurs d’Ecuelles va mettre en concurrence les commerces du centre-ville, et pas seulement la boulangerie de Flora et Eric.
Suppressions d’emploi
Si le projet aboutit et voit l’ouverture d’une franchise boulangère, Flora sera contrainte de licencier du personnel : « Nous ne pouvons imaginer devoir nous séparer d’un membre de notre équipe, nous les avons formés, nous travaillons ensemble depuis plusieurs années maintenant. Nous sommes unis et soudés. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour maintenir les emplois de chacun d’entre eux. Là est notre priorité ».
Pas de boulangerie franchisée ?
Jean-Philippe Fontugne, maire délégué d’Écuelles et en charge du développement local et du tourisme au sein de la Communauté de communes, précise qu’un promoteur a déposé un permis de construire sur le pôle des Renardières pour installer l’enseigne Lidl : « Le promoteur a entrepris des négociations avec les magasins « Grand Frais », dont l’étude de chalandise de celui de Varennes-sur-Seine indique une grande évasion commerciale de notre territoire et du secteur de Fontainebleau. Ce projet est plus sensible pour les commerces locaux, et nous avons obtenu que le permis de construire soit présenté sans la boulangerie « Marie Blachère » pour ne pas créer de concurrence directe avec les boulangeries du secteur ».
Des propos qui ne rassurent cependant pas Flora, qui craint une ouverture en deux temps : « Le « Grand Frais » demande un permis de construire sans Marie Blachère parce que les communes visualisent l’impact que cela peut avoir sur les boulangers-pâtissiers artisanaux. Après quelques mois d’ouverture du Grand Frais, Marie-Blachère s’ouvre. Les 2 enseignes sont liées puisque propriétaires d’une même famille, le père d’un côté, la fille de l’autre. L’idée est qu’ils sont propriétaires de leurs locaux et qu’ils peuvent y faire ce qu’ils souhaitent. Sauf qu’à ce moment là, personne ne peut plus rien faire et il sera trop tard, ils feront ce qu’ils voudront. »