Le point de départ de votre pièce est la thèse Wilhelm Reich, sur l’orgasme ? Quest-ce que son livre a de si jouissif ?
Wilhelm Reich est le premier à avoir parlé de l’orgasme de manière psychanalytique. Dans un contexte de montée du nazisme, c’était révolutionnaire ! Le sujet m’intéressait à la base. Et puis j’ai découvert son texte tellement poétique, avec un discours qui semblait rébarbatif mais que son enthousiasme rendait émouvant. J’avais envie de retrouver sur la scène son destin épique. Ses livres ont finalement été brûlés. Il a été poursuivi par la CIA et a fini en prison. Sur la fin de sa vie, il est devenu un peu fou. Il prétendait avoir conçu une machine à orgasmes qui guérissait du cancer !
Que dit la théorie de Wilhelm Reich ?
Il disait que si les gens avaient des orgasmes sans entrave psychologique, il n’existerait plus de névroses et donc plus de fascisme. La sexualité était, pour lui, un moyen d’éviter la montée des extrémistes. Même si le livre de Wilhelm Reich date un peu, les fondements de sa recherche sont encore très actuels. Les terroristes s’imaginent pouvoir être accueillis par 70 vierges dans l’au-delà, comme s’ils s’interdisaient le droit de pouvoir jouir de la vie au temps présent. Selon Wilhelm Reich, la frustration sexuelle est la base des névroses. Je suis assez d’accord avec ça.
À part « Les monologues du vagin », très peu de spectacles traitent ouvertement de sexualité. Pourquoi d’après vous ?
Je ne sais pas. Avec, le co-metteur en scène, nous nous sommes beaucoup interrogés sur cette question. Il est facile d’en parler sur le ton de l’humour mais la sexualité est rarement abordée de manière sérieuse. Pourtant l’épanouissement sexuel me paraît aussi important que l’épanouissement au travail ou que l’épanouissement social. Peut-être parce qu’il faut dépasser les réticences et la pudeur du public et des institutions. Au départ, les directeurs de théâtre ne nous prennent pas au sérieux. Il est difficile de parler d’orgasme en dehors de la confidence. Surtout quand on est une femme. On est vite cataloguée « trop libérée ».
Faut-il s’attendre à une pièce féministe ?
La pièce parle de l’orgasme féminin et masculin. Bien sûr, je suis une femme et je parle surtout de ce que je connais. Mais « La fonction de l’orgasme » est féminin. Pas féministe. Elle place l’orgasme au centre de la vie intime, sociologique et politique.
Comment met-on l’orgasme en scène ?
Nous avons choisi de partir d’un point de vue scientifique en suivant un protocole d’enquête. Nous avons interviewé des sexologues, des psychologues, des philosophes, et même un gigolo belge. Nous avons posé les mêmes questions à tous ces spécialistes. Des extraits du film sont diffusés sur scène. L’idée, c’est de commencer par une sorte de conférence pour arriver à un monologue théâtral joyeux en intégrant des vidéos où je me filme sur l’évolution de mon ressenti après les différentes rencontres. Cela donne un côté journal intime, à mille lieux du cours sur la sexualité ou du mode d’emploi pour arriver au septième ciel. C’est un spectacle drôle, sensuel et poétique qui met la sexualité en scène sans en faire une vaste blague !
Propos recueillis par Vanessa RELOUZAT
Tarif : 14/ 8 euros. Plus d’infos ; Les Passerelles au 17, rue Saint-Clair, à Pontault-Combault. Plus d’infos : 01 74 59 50 20.