Si les cicatrices sont encore visibles, le sourire et la bonhomie naturelle de l’avocat sont bien là. « Mon moral est bon. Je me remémore certains souvenirs, mais je ne souffre pas de stress post-traumatique ». Selon sa psychiatre, si Henrique Vannier a réussi à dépasser cette épreuve, c’est parce qu’il a toujours tenté de trouver une solution aux obstacles rencontrés.
Solution
« Il y a deux situations : être sidéré, ou trouver une solution, j’ai choisi la deuxième option », dit-il. Pendant l’agression, il a refusé de s’allonger comme l’aurait souhaité Joseph Scipilliti. « Je me suis redressé pour lui faire face, et lui parler. À la fin, j’ai réussi à obtenir une réponse : « Je te laisse en vie ». Une réponse que le bâtonnier n’interprète pas comme un ultime acte de compassion : « Pour moi, il pensait que j’allais mourir ».
S’il a réussi à être préservé psychologiquement, c’est également grâce au soutien indéfectible de ses proches.
Dans les heures qui suivent la tentative d’assassinat, la pression médiatique est extrême. D’autant que le bâtonnier a été annoncé mort par certains. La famille Vannier a reçu des centaines d’appels et messages de condoléances. « Le harcèlement permanent de la presse était compliqué. Il a fallu organiser une réponse, par peur qu’on ne raconte n’importe quoi », témoigne Jérémy, son frère. Au moment des faits, les enfants de l’avocat, âgés de 7 et 10 se trouvaient dans le Jura. Tous deux ont été préservés de l’événement pendant les quatre premiers jours. Aujourd’hui Théo, 7 ans, s’est remis de ses émotions, mais a toujours un peu peur lorsque son père quitte la maison.
Rencontrer la ministre
Henrique Vannier est encore étonné par l’ampleur médiatique de cet événement. Pour lui, n’importe quelle raison aurait été bonne pour Joseph Scipilliti de s’en prendre à lui. « Je savais qu’il était dérangé. C’était quelqu’un de très secret, en guerre avec tout le monde. » Il évoque son manque de sérénité croissant à son égard. « Je me sentais de plus en plus danger avec lui, sans pouvoir déterminer la manière dont il aurait pu me faire du mal ». A aucun moment, l’idée du meurtre ne lui vient toutefois en tête.
Dorénavant, son seul désir est de pouvoir rencontrer Christiane Taubira « pour avoir plus d’appui du parquet général lorsqu’on a affaire à des gens souffrant de problèmes psychologiques. La justice ne peut que s’améliorer. Je ne suis pas amer, ce n’est pas dans ma nature. »
Consolidation
Henrique Vannier compte reprendre son activité d’avocat au second trimestre 2016. Son médecin expert lui a indiqué qu’une consolidation aurait lieu en décembre 2017 pour fixer ses préjudices. En janvier, il passera un IRM de son bras droit. Il ne peut plus le lever, et a perdu l’usage de son épaule droite.
Il découvre chaque jour que de petits actes de tous les jours, comme ouvrir une porte de voiture ou jouer au ballon avec ses enfants, sont désormais impossibles. « J’apprends ça au fur et à mesure, j’ai un gros traitement neurologique et psychologique mais je suis en vie, c’est l’essentiel ». Une sérénité renforcée depuis son arrivée dans le Jura, la semaine dernière. « Avec ma femme et mes enfants, nous revenons tous les mois dans le Jura. C’est notre poumon ».
Julie PHILIPPE