Les quatre plus gros dealers d’un vaste trafic de cannabis qui sévissait depuis mars 2012 dans le quartier du Bréau, à Fontainebleau, ont été jugés lundi 20 avril au tribunal correctionnel, devant une salle comble.
Déjà en détention provisoire depuis leur interpellation en mars, ils sont tous repartis derrière les barreaux le soir même, sous les yeux éplorés de leurs parents, après six longues heures de procès.
Chef de réseau
Suzan S-N, le chef du réseau surnommé H 2, a écopé de trois ans de prison ferme, trois ans d’interdiction de séjourner en Seine-et-Marne et 5 000 € d’amende. Le procureur avait requis contre lui 5 ans ferme, soulignant que l’affaire aurait pu être jugée aux assises.
Âgé de 25 ans, le trafiquant a déclaré assumer une part de ses responsabilités à la barre : « J’ai participé et j’ai investi 350 € en matériel sur Internet, mais j’étais pas tout seul et je n’ai jamais été le chef de qui que ce soit. Je ne travaillais pas avec la résine de cannabis mais seulement avec de l’herbe ».
Son avocat, Me Fatthi Irguedi, a minimisé l’importance du trafic : « C’était une organisation, mais pas un réseau comme on en voit dans les quartiers nord de Melun. Il s’agit de bras cassés qui ont essayé de se faire un peu d’argent. Où sont les signes de richesses ? Mon client squattait un appartement un appartement et roulait avec une Renault Captur de location. Il s’est fait interpeller avec des stupéfiants, ce qui n’arrive jamais pour des caïds de réseau ».
Mises à l’épreuve
Le matériel acheté avait permis de faire pousser une vingtaine de plants chez Gaëtan L., 23 ans, chez qui différentes armes avaient également été saisies. Le jeune homme a reconnu qu’il « lui arrivait de dépanner des amis ». Et il a admis écouler mensuellement environ un kilo de résine et 1,2 kilo d’herbe, moyennant 10 € le gramme. Il entreposait les sachets de drogues dans le congélateur « pour pas que ça bouge au niveau du poids ».
Le prévenu a été condamné à deux ans de prison dont un avec sursis et mise à l’épreuve durant deux ans, avec obligation de soins, de travail et de payer une amende de 2 500 €. Les conditions des mises à l’épreuve sont les mêmes pour Julien N., 19 ans (36 mois de prison dont 18 avec sursis) et Kevin D., 25 ans (30 mois dont 15 avec sursis).
Le premier, malgré son jeune âge, était considéré par les enquêteurs comme ancien guetteur devenu le lieutenant de H 2, car il partageait le même appartement. Mais Julien N. a nié ce rôle devant la présidente du tribunal, reconnaissant néanmoins avoir une cinquantaine de clients : « Je suis un vendeur, Madame, mais j’ai rien touché. C’était du bénévolat ! » Selon les estimations, la vente d’herbe et derésine rapportait tout de même entre 1 000 € et 2 000 € par mois.
« De quoi manger »
« La drogue lui donnait juste de quoi manger tous les jours, pour 10 €, et de se payer un restaurant grec, a relativisé son avocate, Me Florence Paille-Ardilly. Mon client consomme des stupéfiants depuis l’âge de 14 ans et n’a pas réussi à mettre ses neurones d’aplomb. Il était en rupture familiale et envoie de clochardisation. Il n’a pas la carrure d’être un lieutenant de réseau ! »
Quant à Kevin D., qui cultivait aussi des plants de cannabis dans sa chambre, au domicile même de sa mère, il a reconnu seulement une petite dizaine de clients occasionnels. Gros consommateur de cannabis depuis au moins 10 ans, il a indiqué fumer jusqu’à 20 joints par jour : « Je ne travaillais plus alors j’ai voulu gagner un peu d’argent pour ma consommation ».
De son côté, le procureur a évoqué une production avoisinant les 50 kilos et rappelé la lutte du parquet contre les trafics de drogues. « C’est un fléau qui génère beaucoup d’argent, a-t-il souligné. Le réseau du Bréau a mobilisé un certain nombre d’enquêteurs, conformément à la politique pénale de Fontainebleau ».
Agnès GAUDICHON-BRAÏK