Dans Le Parisien, Miguel Lluch Solvès, un maçon espagnol de 53 ans, accuse le président du conseil départemental, Jean-Jacques Barbaux (LR), ancien maire de Neufmoutiers-en-Brie, de l’avoir employé de façon illégale. Aujourd’hui installé à Nangis, il reitère ses accusations pour la République de Seine-et-Marne.
La République de Seine-et-Marne : Avez-vous réellement construit tout seul la piscine intérieure de Jean-Jacques Barbaux à Neufmoutiers-en-Brie ?
Miguel Lluch Solvès : J’ai construit seul la piscine intérieure de Jean-Jacques Barbaux, hormis la plomberie, la charpente et la toiture.
J’ai fait les fondations et j’ai creusé avec une pelleteuse un trou de 15 mètres sur 7 mètres, avec 1 m 12 de profondeur. J’ai aussi réalisé un sauna, une salle de bain, des toilettes, un petit bar et un local technique.
La Rep : Combien d’heures par semaines avez-vous travaillé ?
Je faisais entre 8 et 9 heures par jour, soit 45 heures par semaine. Je travaillais même les jours fériés, comme le 1er janvier. J’ai commencé en novembre 2011 et j’ai été licencié le 30 novembre 2012, quand la piscine a été finie.
Quel type de contrat avez-vous signé ?
J’ai signé un contrat à durée indéterminée avec des chèques emploi service, pour travailler 4 heures par jour selon les besoins, pour tous travaux dans la propriété.
Avez-vous été aidé par des employés municipaux ?
A quatre ou cinq occasions, j’ai été aidé par deux employés municipaux, Jean-François et -Bernard.
Avez-vous utilisé la camionnette de la communauté de communes du Val Bréon ?
Oui, une bonne dizaine de fois, on est allés faire les courses ensemble pour acheter du matériel comme le carrelage, la colle, les plaque de placo, les rails et les montants. C’est Monsieur Barbaux qui conduisait la camionnette Jumper.
Comment étiez-vous logé ?
J’ai d’abord été logé dans le logement de fonction de la Fondation Hardy qui accueille des enfants handicapés à Fontenay-Trésigny. Après, j’ai été dans un appartement de la commune de Neufmoutiers-en-Brie durant trois mois. Je n’ai jamais payé de loyer pendant les travaux de la piscine.
Comment étiez-vous nourri ?
Je mangeais tous les midis à la cantine de la mairie, sauf pendant les vacances scolaires. Le soir, je dînais à la Fondation Hardy. Je n’ai jamais payé aucun repas.
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Comment avez-vous été recruté ?
J’ai connu Jacques Ducastel, l’ancien directeur de la Fondation Hardy (renvoyé en correctionnelle pour détournements de fonds – ndlr), en Espagne, dans une maison achetée en bord de mer. Il m’avait proposé de faire une piscine pour un ami d’enfance à lui, qui était Jean-Jacques Barbaux.En Espagne, il n’y a pas de travail et j’ai signé le contrat en France les yeux fermés. C’était le bonheur.
Aviez-vous conscience de travailler dans l’illégalité ?
Non. Je croyais qu’un maire, président de la communauté de communes, m’employait en toute légalité. Toutes les semaines, il me payait en espèces. Pour moi c’était bon. Les trois derniers mois, il m’a payé en chèques emploi service.
Pourquoi n’avez-vous pas porté plainte ?
J’aimerais bien porter plainte, mais je ne sais pas comment faire. Je ne connais pas la loi française. J’attends qu’on me convoque et ensuite je prendrai un avocat, si possible de la CGT.
Propos recueillis par Agnès GAUDICHON-BRAÏK
Des faits prescrits ? La réponse de Jean-Jacques Barbaux
Pour autant qu’ils seraient avérés, ce que conteste Jean-Jacques Barbaux, les faits incriminés par Miguel Lluch pourraient bien être prescrits par la règle générale d’une ancienneté de plus de trois ans, tant en matière fiscale que d’une éventuelle prise illégale d’intérêt s’il y a eu usage anormal de moyens communaux. C’est d’ailleurs la vérification de cette prescription qui était envisagée en milieu de semaine par le parquet de Meaux.
Il n’en reste pas mois que Jean-Jacques Barbaux (LR), dans sa position de responsable politique, ne reste pas muet sur cette affaire (cf. : le communiqué ci-contre). « On peut certes s’interroger sur la diffusion de ces accusations, après quatre ans, et depuis que je suis président du conseil départemental, alors que j’y fais mener toute une série de vérifications sur son ancien fonctionnement interne, nous a répondu Jean-Jacques Barbaux. Mais on peut surtout analyser les propos de Miguel Lluch en rapport avec mon refus d’alors de l’embaucher à la commune. En fait, on pourrait dire que sa manière d’être aurait pu poser quelques problèmes dans son travail ».
« J’ai voulu aider cet homme, mais sans doute avec des maladresses. En ce qui concerne le chantier en cause, plusieurs entreprises sont intervenues pour les travaux. J’ai déjà pris l’initiative de transmettre à la police tous les documents, justificatifs et factures. Les employés communaux sont venus sur le chantier pour récupérer la terre du trou pour faire des plates-bandes pour la voirie communale, et une fois pour dépanner la pelleteuse en panne. Pour le reste, demandez au nouveau maire, une mise au point a été faite et diffusée aux habitants de Neufmoutiers ».
Didier BARRY