« Monsieur le Proviseur. Je fus élève de 1958 à 1960 puis, de 1960 à 1962, maître d’internat et professeur remplaçant en langue allemande et en sciences naturelles pour les élèves de 6e dans votre lycée que l’on appelait à notre époque Collège… » Voilà comment débute la lettre que reçoivent peu de chefs d’établissements.
La lettre
Le 14 janvier 2015, Hervé Charles écrit un courrier à l’attention du proviseur du lycée Thibaut de Champagne. Son but, arrivé à l’heure du bilan d’une carrière d’enseignant et de maire, est de marquer sa reconnaissance envers trois hommes qui lui ont montré la voie, lorsqu’il était encore tout jeune, au collège de Provins.
« Aujourd’hui, après une carrière dans l’enseignement comme professeur de lettres et allemand (de 1965 à 1999), 25 ans de maire de 1976 à 2001 (dans la commune de Mesvres, dans la Saône-et-Loire), l’idée m’est venue de faire un don à votre lycée. »
Hervé Charles a prévu un don de 5 000 euros. Dans sa lettre, il soumet l’idée au proviseur Mansencal, d’utiliser ce don pour la création d’un prix qui porterait le nom de ces trois hommes à qui il souhaite rendre hommage.
« Prix Chevassu-Ravat-Bellot »
« Trois personnes « clé » qui eurent un rôle prépondérant dans ma vie de jeune adulte. Sans eux, je ne serais jamais devenu le premier magistrat de ma commune, ni professeur…Ce don sera synonyme de reconnaissance, respect et amitié » écrit-il au proviseur.
Hervé a souhaité rendre hommage à ces trois hommes qu’il considère comme des guides. « Chevassu, le principal était quelqu’un de très humain, à l’écoute des élèves. Il était très paternel avec nous. André Ravat, l’intendant était un personnage truculent ! raconte Hervé. Mais il se décarcassait pour le confort des élèves. Enfin, le professeur Bellot était tout simplement extraordinaire. À son arrivée au lycée en 1947, passionné d’antiquité, il a recréé un laboratoire scientifique avec de vieux instruments. Il était proche de ses élèves et captivait les classes. »
Visite au lycée
Suite à ce courrier, l’actuel proviseur du lycée Thibaut de Champagne, Eric Mensencal, s’est renseigné sur la façon de procéder, pour trouver la meilleure manière d’utiliser ce don au profit des élèves, tout en respectant l’âme que souhaite lui donner Hervé. Après de nombreux contacts entre les deux hommes, Hervé Charles fut invité à redécouvrir l’établissement, lors de la journée portes ouvertes du 14 mars dernier.
Souvenirs …
Hervé est un personnage ! En le voyant aujourd’hui, du haut de ses 74 ans, on imagine très facilement le jeune homme jovial et plein d’humour. Malgré les inévitables traces du temps, Hervé conserve une âme pleine de jeunesse. En arrivant devant le lycée, il saute de joie ! Et desuite, tous les souvenirs s’étalent sous ses yeux. « Dans mon adolescence, le paradis c’était l’internat du collège de Provins ! »
C’est en 1958 qu’Hervé tape à la porte du collège de Provins. Après une année à l’usine à Troyes, il se ravise et souhaite retourner étudier. « J’aurais dû redoubler la classe de seconde, mais le principal Chevassu m’a fait entrer en 1re en me disant : “tu vas travailler et tu y arriveras !”. Il faut dire que l’intendant, André Ravat, que mon père avait sollicité par des contacts communs, avait bien défendu mon dossier. »
Prix de la citoyenneté
Après une étude administrative sur les possibilités d’utiliser la donnation d’Hervé Charles, le proviseur est arrivé à la conclusion d’une utilisation sur plusieurs années, à raison de 500 € par an pour l’amélioration du cadre de vie des élèves, sur un projet qu’ils auront eux-mêmes défini. Parallèlement, le Prix de la citoyenneté Chevassu-Ravat-Bellot, sera chaque année décerné à deux élèves qui se seront illustrés par leurs actions citoyennes. Un choix qui enthousiasme Hervé. Il avait glissé à la fin de sa lettre au proviseur : « NB : en 1959, je reçu le prix de la camaraderie… une piste ? »
Marie-Lise CANS