Le tribunal condamne l’épouse à 20 ans de réclusion (©Djony)
Le 7 décembre 2015 à Vimoutiers, vers 19 heures, le corps d’un homme gisant dans une mare de sang est découvert par sa fille. Son épouse est à ses côtés, un marteau est découvert.
36 plaies sur le cuir chevelu
Lors de l’examen, il est constaté un important traumatisme crânien avec enfoncements et fractures. Il est dénombrés 36 plaies sur le cuir chevelu. Grièvement blessé il est transporté au CHU de Caen dans un état jugé sérieux.
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Entendue l’épouse reconnaît avoir asséné un coup de marteau à son mari qui lui reprochait son alcoolisme. L’analyse pratiquée révèlera d’ailleurs un taux de 2,73 g d’alcool par litre de sang. Elle est mise en examen et placée en détention provisoire. Plusieurs mois après, le mari décède mais les causes exactes de son décès ne peuvent être établies.
En juin 2016 elle bénéficie d’une remise en liberté mais suite à de nombreux incidents lors de son contrôle judiciaire elle est à nouveau placée en détention.
Les témoins évoquent à la barre un couple unis et discret qui respire la joie de vivre. Lui serait cependant vu comme un homme possessif et jaloux.
« Une femme transformée »
Lors de son incarcération il y a eu « une prise de conscience et de responsabilité, une renaissance […] Elle a demandé des photos de son mari […] Aujourd’hui c’est une femme transformée qui a perdu de nombreux kilos, elle a beaucoup changé depuis la première fois que je l’ai rencontrée en prison » vient préciser une bénévole à l’aumônerie de la prison où elle est incarcérée.
Des précisons sont apportées par les enquêteurs. Les primo intervenants découvrent un homme gisant dans une mare de sang, une femme à ses côtés, « allongée sur le sol, sans aucune réaction ».
Un diaporama sanglant de la scène de crime est présenté à la cour. On y voit un sol recouvert de sang mais aussi des fragments osseux et pileux preuves d’une très grande violence.
« Je n’ai jamais vu ça »
Elle s’expliquera lors de sa garde à vue. Alors que son mari vient d’entrer aux toilettes elle décide de prendre un marteau qui se trouve dans le bar. En sortant, il se dirige vers la salle à manger. Elle passe par derrière et lui assène un coup au sommet du crâne. Il s’effondre. Elle s’assoie à la table et poursuit sa consommation d’alcool.
« Au cours de votre carrière, avez-vous déjà vu une telle scène » ? demande l’avocate générale aux enquêteurs.
« J’ai vingt-trois de service et je n’ai jamais vu une scène aussi ensanglantée, il y avait dans la pièce plusieurs endroits de violence ».
Aujourd’hui, elle ne peut répondre à aucune question posée par le tribunal, « je ne peux pas vous éclairer, je ne me souviens plus, tout est flou dans ma tête ».
Viol, alcool et violence
« Le -je ne sais plus, je ne me souviens pas- est vraiment problématique » tonne le président.
« Ce que vous avez répété inlassablement aux enquêteurs et au juge ne correspond absolument pas à la scène de crime. Tout ce que vous nous avez dit c’est purement et simplement du vent ».
« Je ne sais pas comment j’ai pu entrer dans une telle violence monsieur le Président » reprend l’accusée.
« Madame nous avons besoin de comprendre ce qu’il s’est matériellement passé, donner trente coups de marteau à son mari et affirmer ne pas vouloir le tuer, il faut l’expliquer » tient à préciser le Président.
L’expert psychiatrique requis pour un examen durant la garde à vue de l’accusée relate à la barre les éléments recueillis lors de son entretien.
« C’est une femme qui a commencé à boire à l’âge de 16 ou 17 ans avant d’arrêter durant sa grossesse. Ce couple va acheter un corps de ferme à rénover qui va les faire plonger dans une situation financière précaire. Lassée de demander des aides et de frapper aux Resto du cœur elle se remet à boire. Elle a grandi dans une ambiance d’alcoolisme chronique. A 13 ans elle est violée par le mari de sa tante, viol qui n’a conduit à aucune réparation, la fragilisant à l’adolescence et la conduisant à sombrer dans l’alcool. Elle est parfaitement consciente de ses actes et ne se donne pas les moyens nécessaires pour se soigner ».
Est-ce une manipulatrice ?
Une autre expertise ordonnée environ un an après complètera en révélant une personnalité coopérante et cohérente, peu empathique, ne présentant aucune compassion pour son conjoint avec un risque de réitération des faits de même nature.
Le président s’adresse une nouvelle fois à l’accusée et lui demande pourquoi elle a évoqué avec l’expert l’espoir de reprendre une vie commune avec son mari alors qu’il était décédé depuis plusieurs jours. « Pourquoi ne pas avoir parlé de sa mort avec l’expert » ? « Il n’a pas dû comprendre, j’en ai parlé mais je dois avouer que j’ai toujours eu du mal à concevoir que mon mari était mort ».
« Je doute madame que l’expert ait mal compris et qu’il ait omis d’en parler. Cela ressemble à une forme de manipulation ».
Pour l’avocat des parties civiles c’est une vie d’enfer que cette femme à fait vivre à sa famille.
« Imaginez cette enfant, encore à l’école primaire, elle est obligée en rentrant de l’école de retirer les clés de voiture de sa mère pour ne pas qu’elle prenne le volant et aller se cacher sous son lit en attendant le retour de son père ».
Relation adultérine avec un habitant de Vimoutiers
Puis ces scènes de violences où ce mari est frappé à coups de poing par son épouse alcoolisée en présence de leur enfant. Quoiqu’elle en dise elle n’avait plus d’amour pour son mari puisqu’elle entretenait une relation adultérine depuis six mois avec un habitant de Vimoutiers, elle ira même jusqu’à lui envoyer un sms le matin même des faits lui proposant en rendez-vous dans leur camping-car.
Son mari était « un boulet qu’elle traînait ». Il parle de la scène de crime comme d’une scène de film d’horreur. Selon lui elle n’a laissé aucune chance à son mari dès le premier coup de marteau.
« Mais combien de temps a pu durer cette scène au regard du nombre des coups reçus ? on ne le saura pas, certainement de longues minutes mais il est certain que son intention de donner la mort est réelle. Durant ses onze mois d’agonies les séquelles sont telles que l’on ne pourra jamais l’entendre ». Il demande au tribunal de retenir la culpabilité de cette femme.
Pour l’avocate générale l’emploi du temps de l’accusée montre bien qu’elle savait ce qu’elle faisait. Elle parle d’une femme intelligente qui connaît parfaitement son dossier mais qui, bizarrement, ne se souvient pas de ce qu’elle a pu dire lors de sa garde à vue. Elle semble prise d’une amnésie sélective.
« On se souvient que lorsque sa fille appelle et souhaite parler à son père lorsqu’elle entend des gémissements, l’accusée trouve une excuse et quand sa fille déclare qu’elle va venir là encore elle va tenter de l’en empêcher. Elle savait donc parfaitement ce qu’elle faisait et au moment où elle a assené les coups, elle n’était pas aussi saoule qu’elle le prétend aujourd’hui. Elle s’est saoulée après ».
« Le doute doit profiter à l’accusée ».
Face à un tel degré de violence, d’acharnement elle requiert une condamnation de trente années de réclusion criminelle avec une peine de sûreté de quinze ans et de prononcer également un suivi socio-judiciaire avec obligation de soin.
L’avocat de la défense commence sa plaidoirie en évoquant, malgré son habitude des cours d’assises, sa peur de ne pas être à la hauteur de la confiance que l’accusée lui témoigne.
« Tout le monde nous dit du mal d’elle, même sa propre famille, son père, son frère. Oui elle est coupable mais je vais vous donner toutes des données pour vous permettre de rendre une peine juste ».
D’une voix qui résonne dans la pièce, il revient sur les différents épisodes la vie et les souffrances de sa cliente, « Il y a mieux comme point de départ dans la vie. C’est une femme qui souffre ».
« Y a-t-il intention dans cet homicide ? Elle ne voulait pas tuer son mari. Les raisons du passage à l’acte ce jour-là, elle a voulu le tuer pour se débarrasser d’un mari gênant ? Oui peut-être, mais qu’est ce qui nous permet de retenir ça ? Rien. Il y a cet état altéré, alcoolique. Peut-être y a-t-il eu dispute, elle a pris le premier objet trouvé, ce marteau qui se trouvait là. Il n’y a aucune certitude quant à ce passage à l’acte. Le doute doit profiter à l’accusée ».
Il s’étonne néanmoins de son placement sous contrôle judiciaire après six mois de détention alors qu’elle est décrite comme violente et dangereuse.
« Face à tous ces éléments, mesdames et messieurs je m’en remets à votre sagesse et vous demande de faire preuve d’indulgence ».
Reconnue coupable
Après en avoir délibéré, le tribunal reconnaît Florence Coquel coupable d’avoir à Vimoutiers le 07 décembre 2015 commis le crime de meurtre sur la personne de René Haquet alors qu’elle était son épouse et qu’aucun trouble n’altérait son discernement.
Elle est condamné à vingt ans de réclusion criminelle et prononce un suivi socio-judiciaire de cinq ans avec adjonctions de soin et interdiction de détenir une arme pendant dix ans.