Très attendu alors que le mouvement des Gilets jaunes tient bon dans les rues, deux mois après son éclosion, l’exécutif espère résoudre la crise avec un grand débat national, qui doit débuter ce mardi 15 janvier.
Dans sa « lettre aux Français », Emmanuel Macron a posé les bases dimanche, assurant qu’il qu’il « n’y aura pas de questions interdites », tout en précisant qu’il ne s’agissait « ni d’une élection, ni d’un référendum ».
Mais comment, quand, où va se dérouler ce grand débat auquel la majorité appelle « le plus grand nombre » à participer ? On fait le point.
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Quand ?
Coup d’envoi ce mardi 15 janvier pour une durée prévue de deux mois, jusqu’au 15 mars. Objectif : que cette consultation nationale des citoyens débouche sur des réalisations concrètes « d’ici la mi-avril », selon le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux.
Emmanuel Macron lancera le chantier en personne par le biais d’un déplacement mardi 15 janvier dans l’Eure, première étape d’une série de visites présidentielles auprès des maires.
Le président multipliera ensuite les déplacements pendant deux mois pour inciter les Français à participer et « rendra compte directement » du débat dans le mois suivant sa fin.
La consultation a en réalité déjà commencé depuis décembre avec la mise en place de cahiers de doléances dans les mairies. A l’initiative de l’association des maires ruraux de France (AMRF), ces cahiers sont destinés aux citoyens qui souhaite partager par écrit leurs préoccupations.
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Qui organise ?
C’était un peu le cafouillage depuis le retrait de Chantal Jouanno, présidente de la Commission nationale du débat public, une autorité indépendante. L’ancienne ministre de Nicolas Sarkozy a jeté l’éponge mardi 8 janvier après la polémique sur son salaire.
Dans la panade après cette annonce surprise, le gouvernement a mis plus d’une semaine à trouver un plan B. On a finalement appris ce lundi 14 janvier qu’un duo de ministres a finalement été retenu pour piloter le débat : Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, et Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales.
Le ministère de l’Intérieur a également envoyé une lettre aux préfets leur demander de désigner un « référent » par département, selon franceinfo.
Ce lundi soir, Edouard Philippe a annoncé qu’un collège de cinq « garants » allait être nommé pour « garantir l’indépendance » du grand débat :
Ce collège des garants sera composé de cinq membres – deux désignés par le Gouvernement et trois désignés respectivement par le Président de l’Assemblée nationale, le président du Sénat et le président du Conseil économique, social et environnemental.
Suivez en direct la déclaration du Premier ministre @EPhilippePM concernant les modalités #GrandDebat national https://t.co/iqFUQSymst
— Gouvernement (@gouvernementFR) January 14, 2019
Le Gouvernement a indiqué également qu’il va proposer à toutes les formations politiques représentées à l’Assemblée ou au Sénat « de participer à un comité de suivi, chargé de veiller au plein respect du principe de pluralisme ».
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Où et comment ?
Le vœu du gouvernement est que des débats citoyens puissent se tenir un peu partout dans le pays : dans les mairies, sur des stands dans les marchés ou lieux de travail, lors de réunions publiques, par le biais d’une plateforme numérique (voir plus bas)…
« Chacun peut organiser un débat, à l’échelle du quartier, de la commune, de la région, d’une association en s’aidant d’un kit pour la tenue des débats proposé par la CNDP », précisait la Commission avant le retrait de Chantal Jouanno.
Le Premier ministre a aussi évoqué « des réunions d’initiatives locales ». Elles « permettront à chacun de débattre au cours de réunions publiques, de se faire entendre et de convaincre ».
« Des stands de proximité seront installés dans des lieux de passages du quotidien », a précisé Matignon ce lundi soir dans un communiqué.
Ils permettront à ceux qui le souhaitent de donner leur avis sur les thématiques mises au débat.
A partir du 1er mars, des conférences citoyennes régionales seront organisées, « associant des Français tirés au sort dans chaque région à des représentants de diverses parties prenantes », a ajouté Edouard Philippe :
Ils pourront participer à l’élaboration de pistes concrètes, donner leur avis sur ce qui ressort des premières semaines du Grand débat national et nourriront ainsi la réflexion sur les suites à donner.
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Quels thèmes ?
Quatre grands thèmes ont été retenus : la transition écologique, la fiscalité et les dépenses publiques, la démocratie et la citoyenneté et l’organisation de l’Etat et des services publics.
Pour tenter d’éviter que ce débat ne se transforme en « grand déballage » et face à la pression notamment des antimariage pour tous, Benjamin Griveaux a précisé que les thèmes de l’IVG, de la peine de mort et du mariage pour tous n’étaient « pas sur la table » et qu’il n’était « pas question » de revenir sur ces « avancées conquises de haute lutte ».
Dans sa lettre aux Français, Emmanuel Macron exclut de revenir sur la suppression de l’ISF, mais ouvre la porte à des réformes importantes comme le référendum d’initiative citoyenne ou la reconnaissance du vote blanc. Au total, le chef de l’Etat a fixé 35 questions à mettre sur la table.
Le pouvoir d’achat, « l’injustice fiscale » et l’appauvrissement des services publics en milieu rural sont arrivés en tête des préoccupations exprimées par les habitants des quelque 5000 petites communes où la consultation a été menée ces dernières semaines.
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Quel rôle pour les élus locaux ?
Le gouvernement « compte sur les maires et les associations pour mettre en oeuvre ce débat », a indiqué le porte-parole du gouvernement. Mais du côté de l’Association des maires de France (AMF), on s’en tient à une position : les maires seront « acteurs mais pas organisateurs ».
Si les maires seront acteurs du débat républicain ouvert à tous (…), ils ne sauraient porter seuls une responsabilité qui n’est pas la leur.
Vanik Berberian, le président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF), a de son côté salué ce lundi sur RTL dans la lettre du président « une rampe de lancement » du grand débat qui « pose bien le diagnostic », mais craint au final un simple « raccommodage ».
Au-delà des postures officielles, certains maires ont déjà pris l’initiative personnelle de ne pas participer.
Qu’en pensent les Français ?
Selon de récents sondages, entre 32% et 41% des Français interrogés ont l’intention de « participer d’une manière ou d’une autre » au grand débat. Mais ils ne sont que 29% à penser qu’il aboutira « à des mesures utiles ». L’approbation des Français pour les « Gilets jaunes est, elle, en baisse, mais reste majoritaire.
Quant aux Gilets jaunes justement, beaucoup nient la légitimité de cette consultation, affirmant que le vrai débat est « dans la rue ».
Infos pratiques : A compter du 21 janvier, les contributions pourront être directement déposées sur le site www.granddebat.fr ou envoyées par courrier postal (Mission Grand Débat – 244, bd Saint-Germain, 75007 Paris).
Un numéro vert France Métropolitaine 0 800 97 11 11 et le 01 82 71 03 39 pour l’Outre-Mer est disponible.
Avec AFP